Produire des données statistiques et cartographiées selon le genre est un exercice complexe, pour plusieurs raisons. Si l’INSEE produit un certain nombre de données genrées à l’échelle individuelle (on dit « ventilées par sexe »), ses études par « ménage » invisibilisent par exemple les variations au sein de cette unité, et donc les potentielles inégalités (en termes de revenus, d’éducation…). De plus, quelques organismes (comme la CAF) font attention à ce critère, mais la plupart des bases de données localisées (par des instituts d’urbanisme, des observatoires municipaux ou régionaux, des associations…) ne prêtent pas non plus attention à ce facteur, et ce sont souvent ces bases-là que nous avons essayé d’interroger.
Pour développer un exemple concret, nous avons travaillé à l’été 2015 sur la base Opile, spécialisée dans les inégalités mais produite à partir de sources très diversifiées. Sa nature disparate empêche souvent de traiter les données de manière comparable : les découpages territoriaux ne sont pas identiques ou l’échelle des découpages différente ; de nombreuses données ne sont pas genrées.
Même une prise en compte du sexe ou du genre selon une logique binaire reste insuffisante, car l’habitude d’assigner un genre selon le sexe biologique invisibilise toutes les personnes ne correspondant pas strictement aux définitions médicales et sociales de « femme » ou d’ «homme ». Ainsi, les personnes intersexes, trans et non-binaires se voient assignées arbitrairement un sexe et un genre qui ne leur correspondent pas forcément. Une prise en compte étatique et statistique de l’existence d’autres catégories de genre permettrait d’être au plus proche de la réalité. C’est par exemple ce qu’a fait l’Allemagne en reconnaissant administrativement l’existence d’un « sexe neutre».
L’atlas des données
Produire un atlas du genre à Paris, c’est-à-dire représenter les variations et inégalités liées au genre de manière spatialisée, n’est donc pas chose aisée. L’ensemble des cartes de cet atlas ne représente en effet qu’une petite partie des données statistiques explorées lors de notre enquête. Rares sont les informations exploitables de manière systématique et comparable : de nombreux indicateurs ne sont pas genrés ; quand l’information existe, elle n’est pas nécessairement intégrée dans les bases. Nous espérons ainsi que tous les organismes, publics ou privés, qui recueillent des chiffres sur les modes de vie, les usages… pensent à systématiquement inclure ce facteur dans leurs travaux ou à l’exploiter lorsqu’il existe, afin de vérifier où des inégalités de genre persistent. Cela permettrait de compléter la connaissance sur l’accès au logement (social ou privé), sur les aides au logement et aux services sociaux, sur la précarité et la pauvreté (en particulier les minima et aides sociaux), sur les demandes d’asile, les niveaux scolaires, ou encore la santé.
Nous présentons donc ici des données sur la démographie parisienne, la scolarité et les formations, l’emploi et les rémunérations, ainsi que les lieux de travail rémunéré et les modes de transports.
Autres ressources
Ces cartes peuvent être complétées par des études franciliennes spécifiques sur les femme réalisées par l’Atelier Parisien d’Urbanisme et l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme d’Ile-de-France :
- La note de février 2010, A Paris les femmes ont des salaires plus élevés qu’ailleurs mais toujours très inférieurs à ceux des hommes;
- Celle de mars 2015 sur Femmes/Hommes : des inégalités qui persistent;
- Le rapport de 2011 : Les femmes en Ile-de-France, regards sur l’égalité entre les femmes et les hommes;
- Celui de 2013, Femmes actives dans les territoires d’Ile de France.
Ces instituts incluent aussi ponctuellement des données genrées, comme dans Les 16-25 ans à Paris. Portrait social et démographique (mars 2015), ou encore Les parisiens de 60 ans ou plus : démographie, disparités économiques et sociales, logement, santé et dépendance (octobre 2012).
Il existe aussi des données et réflexions à l’échelle nationale. Depuis 2018, l’Observatoire des territoires met en place un plus grand nombre d’indicateurs genrés tirés du recensement de 2014. L’INSEE propose des fiches pratiques comme celle sur « La parité entre hommes et femmes ». Cela participe d’un mouvement global encouragé par des instances internationales telle que l’Organisation des Nations-Unies qui promeut des standards minimums dans la production de données genrées.
Voir aussi
Ponthieux, S. (2013). L’information statistique sexuée dans la statistique publique : état des lieux et pistes de réflexion.